Voyager, partir, bouger…quelle est la nuance ?
Mes cartons sont bouclés. Au fil des jours, une montagne de bagages en nylon brun est apparue le long du mur ciel de la chambre. Les meubles démontés sont alignés façon puzzle dans l’entrée nue. Il ne reste qu’ une table d’où j’écris, quelques chaises, un matelas, bientôt chargés dans le camion. Derniers instants d’avant départ, dans les pièces désencombrées de mon passé désormais clos.
Sur le point de prendre la route (cf mon article 2023: ouverture d’un nouveau chapître ), je ne peux m’empêcher de m’interroger sur la signification du verbe « Voyager ».
Voyager est-ce partir ou bouger ?
Partir me semble définitif : on quitte pour toujours un endroit. Résolument, radicalement. C’est un voyage dans le sens où l’on laisse derrière nous les repères familiers pour en adopter de nouveaux. Partir induit une rupture, un adieu déchirant ou voulu, atténué par la promesse de recommencement pour celui qui part. En même temps que lesté du chagrin insondable de la perte pour ceux qui restent. « Partir » égale « Exil », changement de domicile.
Tandis que « bouger » est plus doux. Plus élastique. On s’en va voir ailleurs, on s’en retourne ici. Une semaine à Lisbonne ou Périgueux, puis on revient pour raconter aux amis. On retrouve son logis, son job, son pub, et on s’y rejoue le film du mois d’août. « Bouger » signifie ( à mon sens) aller, venir, se poser, repartir, revenir. Comme une vague ou comme un cycle.
S’expatrier, est-ce voyager ? Dans la mesure où on retrouve un logement, une routine, une familiarité nouvelle mais dans lesquels on s’installe en sédentaire, la question se pose. Je pense que oui, car un expat reste un étranger dans son nouveau pays. Avec un regard décalé, celui de ses origines. Avec ses propres coutumes, sa culture, ses façons de faire apportées dans les valises.
Voyager, c’est avancer.
C’est aller voir. Comment c’est, qui on est. Qu’on parte ou bien qu’on bouge, l’inconnu est toujours porteur de révélations intérieures.
En nomade, en touriste ou expatrié, qu’on voyage au long cours ou le temps d’un week-end, dans tous les cas on confronte notre esprit au changement. La nuance est dans l’intensité de l’exploration. Partir longtemps nous aide à couper le cordon, bouger souvent nous apporte de l’oxygène.
Pour ma part, j’ai la sensation de faire les deux simultanément. Certes, je pars vivre ailleurs. Mais sans rupture, car la faible distance entre France et Belgique facilite les allers et retours. Et je garde un pied à terre dans ma Bretagne natale. Je bougerai donc régulièrement pour y rêgler mes petites affaires, pour y retrouver ma famille et mes proches. Mon sentiment est d’entrer dans une vie en perpétuel mouvement.
Cela me comble, car la vie C’EST le mouvement !
Et vous, êtes-vous de la team « partir » ou « bouger » ?
Je serais curieuse et ravie de connaître votre avis. N’hésitez pas à le partager dans les commentaires.
Merci de m’avoir lue et à bientôt sur Walkaway .
Pour terminer sur une note de poésie, voici un extrait de « Il meurt lentement ».
Un très beau poème attribué à Pablo Neruda, mais qui a été créé en réalité par l’auteure brésilienne Martha Medeiros, qui nous incite avec talent à sortir de notre zone de confort:
Il meurt lentement
celui qui ne voyage pas
celui qui ne lit pas
celui qui n’écoute pas la musique
celui qui ignore comment trouver grâce à ses yeux
…
Il meurt doucement
celui qui est esclave de l’habitude
refaisant chaque jour le même chemin
celui qui ne change jamais de repère
ne se risque jamais à changer la couleur de ses vêtements
ou ne parle jamais à un inconnu
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Crédit photo: archives personnelles