Magie du gris

silhouette d'arbre dans la brume

Magique et désolé, en ce jour de janvier il fait gris, noir, blafard.

Dehors, les arbres nus. Leurs ombres découpées, toutes cagneuses sur l’écran de ciel bas. La pluie tombe en barreaux, percute le bitume, m’enferme à la maison, derrière la baie vitrée. Morose dans mon canapé grège.

A l’abri. Ennui. Que faire, coincée à l’intérieur, quand, comme moi, on ne jure que par le mouvement et les bienfaits de l’extérieur ? Je suis dans une prison météorologique. Appelez le geôlier ! Eh, mais le geôlier c’est moi…

Le temps cendre et charbon asphyxie mon moral. Il faut que je respire. Il faut que je m’évade. Puisque le geôlier c’est moi, j’extirpe de mon trousseau la clé de l’évasion : un livre.

Je plonge dans les pages, pourtant j’ai toujours froid. Mes tourments sont plus forts, ils sont l’ancre impossible à lever. Le récit ne m’emportera pas vers là où les pensées se dissolvent. Je suis toujours ici, dans mon quotidien terne. Je voudrais quelque chose qui m’emmène tout au bout de la terre. Qui m’absorbe. Qui me fasse oublier qui je suis, où je suis, et surtout tout ce que je n’ai pas réussi à être. Aujourd’hui aucun  roman, aucun film, aucun blog, aucune chaîne YouTube, aucune musique n’aura ce pouvoir. Je déclare forfait. Que le gris dictateur et l’anthracite angoisse envahissent mon spleen, puisque c’est déjà fait. Iphigénie 2.0, je m’offre à la déprime.

Pendant que je pleure, je pense encore une fois que le geôlier c’est moi.

Et une nouvelle fois, s’opère la magie du gris

Dans ma poche, je tâtonne et je sens une clé décrochée du trousseau, oubliée depuis je ne sais quand. Elle n’ouvre pas vers l’extérieur. Elle ouvre à l’intérieur.

L’envie m’a prise alors d’attraper mon pc, d’ouvrir une page vierge Word, pour inventer un monde où tous mes rêves sont vrais.  Oubliée, la déprime ? Pas vraiment. Mais transformée, utilisée comme une couleur dans la palette émotionnelle de mes héros. Le gris tristesse est un relief au rose tendre, ou le velours classieux qui drape un rouge vitalité. Je n’ai pas transformé le gris, je l’ai laissé me traverser, j’ai essayé de l’écouter. Finalement ma déprime est un cadeau.

 

C’est le charme de l’hiver, c’est la magie du gris, de nous happer plus bas pour nous mener plus loin. Jusqu’aux berges de nos mondes intérieurs, inconnues des mind-maps de nos conscients en mode pilote automatique.

 

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