A Bord de l’Etoile Matutine

Vague et bateau pirate

 

« A Bord de l’Etoile Matutine », de Riff Reb’s, est sorti en 2009 aux éditions Soleil (collection Noctambule)

Si comme moi vous êtes fan d’histoires de pirates et d’aventures maritimes, jetez-vous sur « A Bord de l’Etoile Matutine ». Riff Reb’s a librement adapté le roman de Pierre Mac Orlan. Tempêtes, tourments, noirceur, les graphismes sont le parfait reflet de cette oeuvre méconnue datant de 1920. Sous le pinceau de Rebb’s, l’histoire est remise au goût du jour, dépoussiérée des tournures de langage d’une époque révolue. Ne reste que l’essentiel: la sauvagerie humaine racontée, et la puissance implacable de la mer somptueusement dessinée.

planche Etoile Matutine Riff Rebs

Résumé:

Alors qu’il se fait vieux, l’ancien mousse de l’Etoile Matutine ressent le besoin de soulager sa conscience. Il prend la plume, et raconte sa jeunesse de pirate sans foi ni loi au dix-huitième siècle.

La BD est en réalité une suite d’anecdotes disparates, parfois exotiques, parfois fantastiques, mais toujours terriblement cyniques. Le fil conducteur est la vie à bord, qui rassemble l’équipage après chaque épisode. Même si elles se terminent souvent de façon abrupte, et n’ont rien à voir les unes avec les autres, on ne se perd pas. Le narrateur  sait nous ramener dans son récit  grâce au déroulé fluide de ses souvenirs, et les scènes de bord sont comme des respirations dans le récit. Au final, on a surtout hâte de savoir quelle farce féroce nous attend après celle qui se termine.

Mon avis:

Graphismes tourmentés  racontant une époque sombre où des mousses pré-pubères assassinent des filles de fermes pour savoir ce que cachent leurs jupes. Et une fois embarqués, trouvent normal de se soumettre aux désirs charnels de leur capitaine, et à toutes les vilenies de leurs frères de la côte. Pas une once de sentimentalisme, encore moins de grandeur, dans ces chapitres anti-héroïques où les vauriens ont la dent aussi dure que pourrie. Et pourtant à travers la misère dépeinte, un lyrisme transcende ces âmes damnées, plus égarées que réellement mauvaises. Nées au mauvais endroit, au mauvais moment, elles ne font que se débattre pour survivre dans un monde hostile.

Leurs travers sont terrifiants. Et ne sont finalement que des tentatives dictées par la survie, pour se hisser maladroitement vers un peu de meilleur. N’est-ce pas intemporel? N’est-ce pas toujours d’actualité pour nombre de migrants d’aujourd’hui? La mer immense et tumultueuse, sur laquelle un dérisoire pavillon claque, a quelque chose de nos sociétés impartiales. Tant d’hommes hissent au dessus le drapeau de leur vitalité désespérée, et risquent le naufrage.

Je trouve que les tonalités monochromes, une différente pour chaque épisode, contribuent pour beaucoup à l’ambiance dramatique. En sépia, gris, bleu, vert, Riff Rebb’s dessine un univers grandiose dont l’impact visuel s’accorde à la poésie féroce des mots. Son narrateur peu recommandable nous emmène pour une virée où le sordide le dispute au grandiose, à l’image peut-être de ce que nous sommes. J’ai adoré la traversée.

 

Bd sur les galets

Pour trouver A Bord de l’Etoile Matutine

Un grand merci

Merci au festival Étonnants Voyageurs de m’avoir permis de découvrir le travail de Riff Reb’s au travers d’une expo. Elle m’a tellement éblouie qu’en sortant je me suis ruée sur ses BD!

Vous êtes amateur de BD maritimes? Vous aimerez peut-être mes post lecture « Aquarica » de Benoît Sokal et François Schuiten (BD)  et Corto Maltese-Le Jour de Tarowean 

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