Dans ma pile à lire, il y avait ce titre, « Sur la gauche avant la Chine ». De Catherine Quilliet, éditions Paul & Mike .
Intriguant, qui sentait le lointain et la singularité avec sa couverture étrange, son auteure inconnue, le touché velouté du bouquin. Sa quatrième de couv’ qui mentionnait « polar » alors qu’on imagine plutôt un récit de voyage. En plein confi-novembre, son potentiel d’évasion m’a aimantée, et je n’ai pas été déçue.
« Sur la gauche avant la Chine » est l’histoire de Théo, qui comme son nom ne l’indique pas, est une jeune femme en quête de sa mère.
Abandonnique séductrice, cette dernière a disparu sans prévenir, laissant père et enfant- Théo de huit ans comme deux lests encombrant largués par- dessus bord pour atteindre son graal personnel. Vingt ans plus tard, Théo est devenue la jeune adulte affectivement inadaptée mais sexuellement active qu’on découvre au début du récit.
En visionnant une vidéo, elle croit reconnaitre sa génitrice et se met en tête de la retrouver. Elle part alors au fin fond du Tadjikistan, dans une mission scientifique qui étudie les doméglis. Ces créatures étranges le sont pourtant bien moins que les meurtres qui émaillent les recherches de l’héroïne.
Pourquoi j’ai aimé « Sur la gauche avant la Chine »
J’ai tout de suite adoré le ton ironique et détaché de Théo, la perturbée à qui on ne la fait pas, spectatrice implacable de ses propres errements. Sa voix off pince-sans-rire surplombe le récit d’un détachement clinique, amusé et touchant. Le personnage de la fille d’à côté parachutée au milieu de nulle part est aussi un des gros attraits du roman.
C’est l’occasion de faire de l’ethnologie de béotien.
Et d’explorer avec elle les arcanes prosaïques d’un camp de scientifiques supposément mystérieux. Les décalages novices-initiés, occidentaux-locaux, sont l’occasion de beaux pointages de doigts sur les clichés « découverte de l’autre » habituellement véhiculés par les récits de voyage catégorie biographie.
La fiction permet la véracité. Théo est une touriste, plutôt qu’une voyageuse. Elle nous rappelle que non, boire un thé chez une tadjique hospitalière n’est pas forcément un moment extraordinaire. Que oui, on s’ennuie et on déprime même enveloppé d’un décor grandiose.
L’exotisme nait autant du décor que de la galerie des personnages.
Tous ont une ombre au coin de l’œil, que l’on sent sans qu’elle soit dévoilée, et bien sûr c’est cela qui attire. La suggestion qui flotte donne à l’intrigue dense une odeur très humaine de névroses refoulées. La mère de Théo a baladé son monde, sa roublardise, sa peine, de Paris à Douchanbé, d’un mari dévoué à des amants lamentables ou utiles. Et Théo suit ses pas, cheminement géographique, social, affectif. Errements initiatiques aux marges du Pamir autant que d’elle-même, seul moyen de tracer sa route personnelle.
« Sur la gauche avant la Chine » raconte la quête d’une fille en mal de mère, mais aussi le voyage de tout un chacun vers l’apaisement intérieur. Mélange d’action, d’aventure, d’introspection, registre langagier soutenu tendance thésard, additionné de populaire et de léger, le dosage est très réussi. Le résultat m’a apporté l’évasion divertissante et l’universalité existentielle que j’aime dans la littérature. J’espère que sa lecture vous apportera autant qu’à moi.
Et vous, que pensez-vous de « Sur la gauche avant la Chine »? N’hésitez pas à partager votre avis dans les commentaires.
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